Les innocentes

Regarder ce film c'est accepter de se laisser surprendre par Anne Fontaine la réalisatrice. L'histoire est prenante, inspirée de faits réels (pendant la seconde guerre mondiale des religieuses sont violées et se retrouvent enceintes), mais le récit passe presque au second plan. Ce qui très vite nous happe, ce sont les visages de femme et la lumière. Comme une partition, les visages des comédiennes Lou de Laâge et Agata Buzek se répondent tout au long du film et derrière chacun d'eux une écriture ciselée emmène le spectateur ailleurs que dans l'histoire.

Cet ailleurs est dans la Lumière, le travail remarquable de la chef opératrice Caroline Champetier renouvelle les liens entre lumière et espace religieux. La lumière est aussi là où on ne l'attend pas; alors que l'histoire se passe dans un monastère, la lumière n'est pas divine, elle est englobante, douce et certainement le reflet d'une foi en l'Homme, sans qu'il soit question de Dieu. Le film n'est pas anti religieux il est à portée de regard humain et c'est là son côté précieux : on peut prendre le temps de s'imaginer du côté des religieuses ou de l'infirmière de la Croix Rouge, alterner les points de vue et, toujours, être accompagné par la lumière.

Aucun sillon n'est vraiment creusé dans le film, on frôle les enjeux comme les psychologies des personnages, ils apparaissent tels des fantômes pris dans leurs propres tourments, sans que le spectateur puisse, doive être juge, pas le temps, tout s'enchaîne. Les problématiques sont denses : qu'est-ce que l'enfant qui naît, la Foi, l'engagement, les ravages de la guerre, le sacrifice, l'honneur...on traverse le film et ses problématiques avec pour guide bienveillant la lumière. Le film terminé, ce n'est plus forcément l'histoire qui nous touche mais la proximité avec les personnages, leur complexité, on se sent compris dans notre difficulté à faire des choix au quotidien (à trouver la lumière?) sans pourtant être des héros.

Arriver à transformer des héros en visage, donc en humanité est une des forces de ce film, une bonne raison de le regarder.




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