Le sens de la fête

Le sens du rire et de l'Autre.

Les deux réalisateurs ont un goût de la vanne très maîtrisé :

- celle qui tombe en fin de plan
- celle qui ne semble pas en être une
- celle qui fait cliché
- celle qu'on voit venir
- celle dont on se dit "non...ils ne vont pas la faire!"
- surtout, celle qui nous fait participer

Quel plaisir de se sentir pris en compte, attendu, concerné, bref, considéré comme un Spectateur.

L'intelligence du film est dans la linéarité de sa narration : on suit les préparatifs d'un mariage, son déroulement, son achèvement, et au petit matin, le départ de l'équipe qui l'a préparé (puisque c'est Elle l'héroïne du film). Ce n'est pas la construction la plus révolutionnaire du cinéma mais elle fonctionne, ils maîtrisent. On accompagne le chef de cette équipe, Jean-Pierre Bacri, parfait dans ce rôle...là encore, ils maîtrisent.

Autre point très fort du film, sa contemporanéité. Dans quel autre film a-t-on déjà vu un stagiaire de troisième? Quels autres cinéastes pensent à faire apparaître ce statut hyper contemporain? Eux s'en servent et l'analysent avec pertinence. C'est un des personnages les plus juste et drôle du film...le stagiaire de troisième...le film est de notre temps, populaire et il fait du bien.

Autre aspect populaire, il s'agit d'un film black-blanc-beur-peace. Ce n'est pas le premier pour les réalisateurs, et ce n'est ni une facilité ni un cliché, mais un propos : une image de la France aussi juste que les autres. Oui, on peut être arabe et avoir «deux de tension», être indien et cultivé, français et solidaire, professeur et désabusé, franco-français et un peu crétin, black et parler banlieue mais pas que, être gendarme le jour et arrondir ses fins de mois la nuit en servant dans des mariages (sans forcément être raciste)...et tous ensemble, on peut.

Le rire est là, avec et pour nous. Le scénario est pointu, seul le montage est un peu approximatif : difficile d'écrire des séquences comiques, de les filmer et de mesurer (rectifier) les écarts au montage. Autre bémol, une petite erreur de casting, Suzanne Clément, très (trop) marquante dans Mommy, on ne la sent pas à sa place, elle ne semble pas comprendre le rythme, l'univers du film, elle y apporte le sien mais il est décalé (à moins que ce soit nous qui l'attachions trop à Mommy), dommage. Pour ce rôle on aurait pu penser à Noémie Lvovsky, Sandrine Kiberlain ou Julie Delpy.

"Intouchables" n'était pas une comédie, "Samba" non plus, "Le sens de la fête" en est une. Elle entre dans la catégorie des films comme "La cité de la peur", "Mary à tout prix" ou "Rabbi Jacob"...bref celle qui assume de faire rire avec humanité et précision, partage et compréhension.

Eric Toledano et Olivier Nakache montrent la partie immergée de l'iceberg "Tolérance", on souhaiterait la voir plus souvent, les seconds tours d'élections présidentielles seraient peut-être différents. You're just too good to be true...I can't take my eyes off you...





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