Stella

Sylvie Verheyde filme comme on se souvient, attrape le parfum de nos dix ans et nous y replonge.

Pourtant, la vie de Stella n'est pas la nôtre : elle grandit dans le café de ses parents, la plupart du temps livrée à elle-même, entre ennui et ivresse des clients. C'est souvent la fête au bar, mais la fête triste, pour oublier. Pendant une partie du film on observe sa vie, plutôt ennuyeuse, et sans comprendre pourquoi, on bascule à ses côtés...les images de notre enfance reviennent...une réplique humiliante de professeur, des chaussures à talons un peu grandes, des posters sur les murs...et un océan de solitude.

Comme nous, elle traverse le terrain miné du monde d'adultes, difficile de savoir qui on est, où on doit aller. Arrivée au collège, il faut se trouver des copines, ne pas rester seule, autre terrain miné. Différences de classe sociale, de niveau scolaire, physique, Stella les accumule mais s'en fiche...presque...

Sa bouée s'appelle Gwladys, ses parents s'occupent aussi peu d'elle que ceux de Stella. Elle est rousse, a une bouille d'enfant et lit Cocteau, Balzac. Pour avoir un point commun avec elle, Stella va les lire, ils seront ses autres copains. Elle est toujours mauvaise à l'école mais s'améliore, "développe un bon esprit de synthèse", et sans savoir ce que c'est, juste parce que ça ressemble à un compliment dans la bouche du professeur, elle aime "l'esprit de synthèse".

Stella part aussi en vacances dans le Nord, chez sa grand-mère qui ne met jamais de culotte et fait pipi debout. Elle y retrouve sa copine et ses cinq frères et sœurs, dont une "attardée mentale", une malade de la "polio" et un père borderline. Mais c'est la vie, rien de grave, Stella slalome dans tout cela, prend le meilleur et grandit.

La réalisatrice filme comme on vit, sans chercher à transmettre de message ou à donner de leçon. Comme si, de tous les moments de notre vie, le plus anodin pouvait avoir été le plus important.

On traverse le film avec un petit nœud dans la gorge, incertain de notre passé. Sait-on jamais si notre enfance a été difficile, douloureuse ou si nous n'avons rien vu parce qu'on y était, il fallait la vivre.

Personne dans sa famille n'aide Stella, elle n'est pas maltraitée, elle est seule. La réalisatrice attend la dernière minute du film pour le confier, c'est par le lycée qu'elle a trouvé son chemin. Ce ne sera pas facile, mais c'est décidé.

Stella est un « Merci » à l'école, c'est rare. Il est sincère parce que discret, presque inavoué.

Slow langoureux, short à paillettes et halo de lumière amoureux sont également compris...quand même...


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