4 mois, 3 semaines, 2 jours

Palme d'or 2007.

Du cinéma. Un pays, la Roumanie, et un avortement.

Un réalisateur qui sait où poser sa caméra et pour combien de temps.

Le film raconte un avortement clandestin dans la Roumanie des années 80 et il est intéressant de se dire qu'il y a 44 ans, en France, les problématiques étaient les mêmes. Chabrol l'a traitée dans "Affaires de femmes" en 1988, trente ans plus tard, le même outil de Cinéma (la caméra) mais pour le dire autrement.

Le dire avec des silences, des plans longs, des cadres qui enferment les personnages ou les mettent à distance, comme deux pôles qui s'étendent de part et d'autre de l'écran. Et c'est très étrange comme, pour une fois, la présence de Cinéma dans les cadres permet de faire basculer pleinement le spectateur dans le regard, la pensée des personnages.

Gabita se fait avorter avec l'aide de sa copine Otilia et peut-être qu'au-delà de l'histoire forcément dramatique de l'avortement clandestin, le plus intéressant est à voir du côté de l'amitié, des actes qui la soutiennent, et peut-être des illusions qu'ils apportent.

Gabita gère mal, trop stressée, enchaîne les mensonges et oublis et c'est Otilia qui rattrape tout, voire, se sacrifie pour que sa copine soit avortée. Elle traîne avec elle tout le long du film une responsabilité dont on ignore si finalement l'amitié qu'elles se portent en fera une réciproque. La dernière séquence laisse un goût amer sur cette histoire d'amitié, une reconnaissance de la copine du bout des lèvres, assez inconsciente de la portée des faits, du transport de fœtus dont il faut se débarrasser, aux risques physiques et psychologiques pris par sa copine...

Cristian Mungiu est un cinéaste qui a compris le cinéma de Ken Loach, des frères Dardenne et de Mike Leigh, il sait filmer au plus près des corps sans pour autant être psychologiquement intrusif. Le spectateur a sa place, le plus souvent celle du réalisateur qui refuse de sacrifier à la surenchère des axes de caméra ; il privilégie un regard qui se pose, quitte à couper un cadre, on a vu cela aussi chez Ruben Ostlund, avec plus d'ironie peut-être.

Bref, le cinéma est précis mais le propos un peu confus, on reste seul avec le personnage d'Otilia à la fin, comme otage de ses sacrifices, avec la même impression qu'elle, celle de ne pas rester indemne. L'amitié est incertaine, l'amour problématique. Le personnage principal reste en marge jusqu'à la fin du film, au figuré comme au propre, au bord de l'écran.

Un film pour marquer les esprits sur deux thèmes forts, peut-être paradoxalement plus fait pour son propos que pour explorer les possibilités du Cinéma.











Commentaires