La passeuse des Aubrais

Film documentaire.

Michaël Prazan raconte l'histoire de son père, enfant juif caché pendant la seconde guerre mondiale. Peu disert tout au long de sa vie sur ce qui lui est arrivé, son fils parvient à le convaincre de témoigner de son histoire à l'I.N.A, institut qui rassemble l'ensemble de ces témoignages.

Le fils écoute dans une salle à côté, le père est filmé, assis, seul sur un fond bleu et répond aux questions de son interlocutrice, amie réalisatrice de Michaël Prazan.

Il y a dans ce documentaire un ensemble de problématiques fortes et mêlées : la relation père-fils, la relation enfant juif-passeuse, la relation de la France à son Histoire, les choix que chacun fait, et qui, aussi petits soient-ils peuvent advenir déterminants, voire fatals.

Le film arrive à nous plonger dans l'histoire de ce père, de cette famille décimée par le régime nazi et permet aussi de comprendre une France complice et une France résistante. La figure de la passeuse est le pivot du film, elle raconte comment sauver ses enfants l'a menée en camp de concentration, et comment le réalisateur ne la croit pas, tant son père l'a dite complice de la gestapo. Enquête menée, la passeuse est bien allée en camp de concentration, mais a aussi fréquenté un des collaborateurs les plus zélé et terrible de la région d'Orléans.

Les paroles de la passeuse redessinent l'histoire de son père en lui donnant toute son ambiguïté, sa douleur aussi. Et surtout, le parcours du père est passionnant. Finalement laissé orphelin par l'Allemagne, il a été élevé après la guerre dans des centres pour orphelins, a travaillé dans la confection pour finir par créer la marque Patrice Bréal. Après une crise cardiaque, il a tout laissé tomber pour ouvrir une galerie d'art et se consacrer aux artistes d'après-guerre. Une reconversion qui en dit beaucoup sur l'Art, son pouvoir de parole et de guérison.

Le réalisateur fait de ce portrait d'Histoire un portrait en creux de son père, de la difficulté qu'il a eu à construire sa paternité.

Le film dure 85 minutes que l'on ne voit pas passer. Il rend aussi fascinantes les recherches faites sur son histoire, celle de la passeuse, celle des enfants juifs, on suit cette histoire comme une généalogie incroyable reliant la petite mais vitale histoire, à celle de la grande, lointaine mais pourtant tangible.

Un film d'aventures.





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