Thelma et Louise

Film réalisé en 1991 par Ridley Scott, scénario de Callie Khouri. Le film féministe incontournable sur l'amitié. 

Thelma et Louise, deux amies, ont juste envie de souffler pendant un week end. Elles partent pour une fête et dès le premier arrêt, rien ne sera plus comme avant.

Il a tant été dit que le film était féministe, proposait enfin au cinéma américain des héroïnes aussi violentes qu'auraient pu être les hommes, qu'il mettait à mal le masculin...que cette chronique passera sur cet aspect. Ce qui demeure étonnant, c'est que malgré une telle bombe féministe, trente ans après, il ne semble pas en avoir recueilli les fruits ; il pourrait être tourné de nos jours tant presque rien n'a changé.

L'élan du film est aussi ailleurs, dans sa réalisation, et finalement avec un personnage masculin, le policier. 

Ce qui surprend dans la réalisation, c'est sentir à quel point les Etats-Unis écrivent leur histoire à partir de leur Cinéma. Le film se déroule dans les années 80 et il porte non seulement son époque, mais surtout les images qu'en a fourni le cinéma, l'histoire que ce médium a forgé : les références aux westerns, aux films d'Hitchcock, de Spielberg, à la tradition du road-movie...en enlevant tout cela, le film n'est "presque" rien, comme s'il avait besoin pour faire exister son histoire de passer au peigne fin le cinéma de son époque. Etrange pays qui a besoin de son Cinéma non seulement pour se comprendre, mais pour être. Ridley Scott le filme à la fois tel qu'il peut être du point de vue du scénario, mais surtout tel qu'il existe en Cinéma, avec ses paysages grandioses, ses routes gigantesques. Thelma et Louise, de Paris à Marseille ne tiendrait pas...le film est américain et ne peut qu'être américain. Egalement parce qu'il refigure les personnages clefs de son cinéma, le policier, le mari, le dragueur, la serveuse, et celui qui doit le plus souvent porter une arme : un homme.

Le film est aussi celui du réalisateur dont le personnage d'Harvey Keitel pourrait être le porte parole. Il faut être attentif aux dialogues pour comprendre que très loin de décrier les hommes, c'est au contraire à la possibilité qu'il a d'écouter et de comprendre les faits qu'il faut s'attacher, jusqu'au plan final souvent décrit comme un envol vers la liberté des protagonistes femmes, sans voir qu'un homme court, seul, pour tenter de les sauver. Le plan est éloquent, mais submergé dans l'action et la finalité des deux personnages, on l'oublie.

"Thelma et Louise" est un double élan vital, celui de la prise en main des femmes de leur condition, et celui du réalisateur qui, par la finesse de sa réalisation et sa mise en valeur des dialogues propose une autre relation homme/femme.

Le tout saupoudré d'une passion pour le Cinéma comme possibilité non pas de représenter un pays mais de lui construire son identité, son image, son recul.

On reconnaît un grand réalisateur dans sa capacité à poser la caméra au bon endroit : comment peut-il venir à l'idée de filmer la descente d'un chauffeur de camion dans le reflet de son enjoliveur...très certainement parce qu'on a parcouru, en amont, les moindres recoins de son film.

Alors on retient son souffle et on part 2h09 dans la valise foutraque de Thelma ou sous le foulard de Louise avec au volant...Ridley Scott.



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