La vie moderne

Les vieux ont les yeux qui collent et Raymond Depardon sait les filmer. 

Les vieux qui ont les yeux qui collent ont des familles, et Raymond Depardon sait les filmer.

Les vieux qui ont les yeux qui collent et leurs familles ont des terres, des bêtes et Raymond Depardon sait les filmer.

Il paraît que "la vie moderne" est un film sur les paysans...il réveille surtout celui qui sommeille en nous, affleure quand on est face à la nature ou dans nos familles. Lorsque rassemblés devant le silence d'une caméra qui attendrait de nous filmer transparaît le plus intime de ce que nous sommes.

Le réalisateur réussit une odyssée puissante dans le calme des intérieurs, les chemins et les visages des paysans rendus sculpturaux. Le film commence par un travelling avant, c'est dans ce mouvement que son énergie nous emmène, avec une volonté déterminée, douce, d'aller rencontrer l'Autre, ou, juste, de prendre de ses nouvelles. Il y a dans cette puissance quelque chose de très fictionnel, Raymond Depardon met en scène ses protagonistes comme des personnages et on se lie très vite à eux, ils ne sont déjà plus tout à fait réels mais pourtant profondément ancrés à l'intérieur.

Un film comme une élémentaire amitié : je t'aime, donc je vais te voir. Pris au jeu de ce dispositif, il devient presque palpitant dans son calme et ses silences. Cette excitation associée à ces univers si lointains, silencieux fait du film une expérience assez unique.

Et s'il fallait retenir un chapître du film, ce serait la visite à Paul, comme on dit un texte religieux "Lecture du livre de Raymond Depardon, la visite à Paul".

Si l'envie de silence se fait en vous, regardez ce film, il emplit de vie.



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